Chronique Zaï zaï zaï zaï (Fabcaro) - Six pieds sous terre

Publié le mercredi 30 novembre 2016 par Vivien Arzul. Mis à jour le 30 novembre 2016 à 21h53.

Fabcaro est un auteur prolifique ayant collaboré à de nombreux projets qu’ils soient collectifs ou individuels. Il cumule les casquettes de scénariste et de dessinateur, ce qui lui permet de travailler sur des univers divers et variés. Il endosse notamment le rôle de scénariste pour continuer à faire vivre d’illustre personnage du Neuvième Art comme Achille Talon ou Gai-Luron. Il exerce également ses talents graphiques à travers des albums parfois poignants comme son carnet du Pérou, mais majoritairement atypiques et pleins d’humour. C’est dans cette veine qu’il signe Zaï zaï zaï zaï, un polar à contre-courant où l’humour et l’absurde côtoient les codes du genre.

L’histoire en deux mots

Zaï zaï zaï zaï (Fabcaro) - Six pieds sous terre

Alors qu’il est au supermarché pour régler ses achats, Fab se permet de dire à la caissière qu’il a oublié sa carte de fidélité. Cette dernière panique et appelle la sécurité comme si cet oubli anodin était un terrible crime. Après un bref échange avec le vigile, il se sauve, un poireau à la main, sachant que la fuite est son seul salut. A partir de là, il va se retrouver au centre d’une gigantesque et rocambolesque traque.
Tous les médias s’emparent de l’affaire "de la carte" en faisant même de celle-ci une priorité éditoriale. Il devient un fugitif et va être confronté durant sa fuite à bon nombre de situations drôles et improbables. Même sa profession cherche à se mobiliser, avec l’idée d’un album de bd, tout comme des chanteurs feraient un hymne en hommage à sa mésaventure. A travers ce road movie décalé, une question se pose : Fab va-t-il pouvoir réussir à échapper à l’impitoyable glaive de la justice ?

Le dessin

Zaï zaï zaï zaï (Fabcaro) - Six pieds sous terre

Fabcaro choisit d’utiliser beaucoup d’aplats noirs ce qui donne à l’environnement graphique de l’album une identité très inscrite dans le polar. Ce choix permet de mettre en premier plan les personnages dans les cases. De plus, cette sensation est accentuée par le fait qu’il y ait très peu voire pas du tout de décors dans l’album.
Cependant, le fait de faire évoluer son personnage dans un décor minimaliste à un double avantage. Premièrement, ce choix du dessinateur renforce l’égarement du protagoniste dans ce road movie invraisemblable. Et deuxièmement, cela incite le lecteur à se focaliser sur l’action et la force des dialogues. De plus, la mise en couleur appuie également ce choix graphique.
Ce parti pris graphique servi par un trait efficace fait de cet album un récit avec de très bonne idée scripturaire.

Le scénario

L’histoire de ce volume peut paraître farfelue. Pourtant, sous chaque situation fantasque se trouve une seconde lecture, ce qui donne une richesse incroyable à l’album. En effet, à travers chaque scène se trouve un critique de notre société, notamment sur la médiatisation à outrance de chaque fait divers. Ou encore "l’engagement d’artistes" pour une cause en vue de rentrée d’argent supplémentaire.
Au-delà de l’aspect comique, le lecteur découvre un personnage attachant qui a peur de perdre les siens lors de sa fuite, ce qui lui donne une profondeur remarquable. Mais la véritable force de l’album est indubitablement son humour absurde avec des situations désopilantes, que ce soit avec les discussions de bistro venues d’ailleurs ou la réaction du vigile en début d’album.
Enfin, la structure du récit est particulièrement réussie jusqu’à sa fin aussi déroutante que le reste de l’album.

A l’image de Houppeland de Tronchet, cet album est une critique de notre société faite avec humour et talent, pourtant empreint d’un réalisme saisissant. Le tout appuyé par un trait plaisant qui rend la lecture agréable dans ce récit haletant.

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