Tout l’univers de Dupuy Berberian

Tout l’univers de Dupuy-Berberian retrace plus de vingt années de collaboration graphique. De leurs sérigraphies représentant Kiki, Joséphine Baker, Arletty, Jacques Tati ou Charles Trenet, à leur travail publicitaire et leurs dessins pour la presse en passant par les couvertures pour Télérama, la campagne pour les vins Nicolas, mais aussi les pochettes de disque, les affiches de film, les livres, les carnets de croquis... Tout leur univers, ou presque

Nous sommes en 1981, le musée des Arts décoratifs à Paris accueille une rétrospective des oeuvres de Tomi Ungerer. C’est un choc pour les étudiants en arts graphiques que nous sommes à l’époque. Voilà un artiste qui s’amuse en transgressant les codes étroits de l’édition pour enfant, de l’affiche publicitaire ou du dessin d’humour. Il y a dans son travail, une dimension qui dépasse le support, ou comme on dit en anglais, on y voit plus que ce que l’oeil peut y trouver. Le style même de Ungerer est transgressif, du moins par rapport à ce qui se pratique professionnellement en France. Méconnu ici, mais au sommet d’une carrière florissante aux États-Unis, on ne sait pas d’où vient exactement ce Tomi Ungerer. Surprise, c’est marqué dans le catalogue de l’expo, il est français d’Alsace mais c’est de l’autre côté de l’océan qu’il a trouvé un écho favorable à son talent. Enfin, disons crûment que pour croûter, il lui a fallu s’expatrier, parce qu’ici, personne ne voulait de lui. D’ailleurs, à quelques mois près, va se dérouler dans la capitale, quai d’Austerlitz, le premier Salon des illustrateurs ultra professionnels, juste à côté d’un grand stockeur de moquettes. Ce premier Salon est un festival de l’horreur. Les mercenaires de l’image dessinée pinaillent sur l’éclat d’une dent, ou s’excitent sur les reflets d’un réservoir de moto. C’est une jungle de graphouilleurs hyperréalistes ou chaque hyper est un loup pour son frère. Nous pourrions être diplomates et dire que, certes, nos goûts, il faut bien le reconnaître, ne nous poussaient pas (et ne nous poussent toujours pas) à admirer ce genre de prouesses techniques, mais bon, bref, ça allait du sous Norman Rockwell scolaire au n’importe quoi pourvu que ça fasse plus vrai qu’une photo retouchée avec les pieds. Tout cela en dit long sur la médiocrité dans laquelle se complaît l’illustration en France en ce temps préhistorique.