Astérix T34 : L’Anniversaire d’Astérix et Obélix – Le livre d’or (René Goscinny & Albert Uderzo) – Editions Albert René

Publié le mardi 17 novembre 2009 par Lionel Dekanel. Mis à jour le 17 novembre 2009 à 21h21.

A l’heure où le petit gaulois fête son cinquantenaire, Astérix est définitivement devenu une institution, non seulement de la bande dessinée, mais de la culture (osons le mot) en général. Et avec les institutions, soit on est inconditionnel, et de toute façon on achètera, soit on est allergique, et rien ne saurait faire fléchir ce sentiment.

Alors, me direz-vous, à quoi bon chroniquer ce nouvel album d’Astérix, qui vient fort opportunément célébrer son demi siècle d’existence ? Bah ! Disons que je suis un inconditionnel, ça devrait suffire comme explication. Ceci étant, pour inconditionnel que je sois, ça ne m’avait pas empêché, comme beaucoup, de trouver que l’album précédent, « Le ciel lui tombe sur la tête », était un ratage complet. C’est d’ailleurs le seul album de la collection qui manque dans ma bibliothèque, et qui y manquera toujours. Mais bon, un ratage en cinquante ans, on peut quand même décemment considérer que le solde reste largement positif.

Certes, avec la mort de Goscinny en 1977, et la reprise du personnage par le seul Uderzo, on a pu noter un léger essoufflement de ci de là (Uderzo est un excellent dessinateur, mais il n’est certainement pas aussi doué que Goscinny pour trousser un scénario), ceci étant, tout ça restait quand même de plutôt bonne tenue. Jusqu’à… Mais on ne va pas ressasser ça ad vitam aeternam

Or donc, ce nouvel album se veut un livre d’or pour le gaulois le plus célèbre depuis Vercingétorix (et ça fait quand même un bail), mais, curieusement, il ne s’agit pas d’un hors-série comme il y en eut parfois au fil du temps Le livre d’Astérix le gaulois, Comment Obélix est tombé dans la marmite, ou Astérix et ses amis – Hommage à Albert Uderzo), mais bel et bien du trente-quatrième opus de la série.

Ne vous attendez pourtant pas à lire une histoire d’Astérix comme les autres. Il s’agit bien ici d’un recueil de petites historiettes, même si celles-ci sont liées par un fil conducteur pour en faire un album d’un seul tenant.

On commence par le petit village que nous connaissons si bien, mais en l’an 1 de notre ère, soit, si vous avez bien tout suivi, cinquante ans pile poil après les évènements relatés dans les trente-trois premiers albums. Tout le monde s’est un peu dégarni, certains ont perdu des dents, d’autres sont un peu durs de la feuille, ces dames ont pris de l’embonpoint (même, sacrilège, madame Agecanonix, cruelle déception), tous, ou presque, sont parents, voire grand-parents (comme Astérix lui-même par exemple), bref chacun a subi du temps l’irréparable outrage. Quoi que… non, pas tout à fait tous… Assurancetourix chante toujours aussi mal, même s’il est toujours persuadé du contraire, ce qu’un Cétautomatix perclus de rhumatismes se charge de lui rappeler à coup de canne, à défaut de marteau. Agecanonix, lui, n’a pas pris une ride, à croire qu’il est né vieux et qu’il est immortel (à tout le moins, il est plus que largement centenaire, Jeanne Calment semble avoir eu un ancêtre qui a fait plus que de la résistance). Et Obélix est toujours célibataire, bien que ses belles tresses et moustaches rousses soient devenues blanches. Ce qui a changé chez Obélix, ce sont les temps et les mœurs, et ça le désole. Les romains ne combattent plus les gaulois, ce qui le prive d’un de ses passe-temps préférés, et l’occupant ayant rasé la plupart des forêts pour construire des villes, les sangliers aussi ont déserté la région, ce qui, évidemment, lui a fait perdre son second hobby. Du coup, il n’a même plus la force de tailler et livrer ses menhirs… Enfin, si, la force, il l’a toujours, c’est le cœur qui n’y est plus…

Mais tout ceci n’était qu’un mauvais rêve…

Dès la page 8, nous revoilà en 50 avant Jésus-Christ, et tout redevient normal. Pour fêter l’anniversaire de nos deux héros (rappelons qu’ils sont nés le même jour, et pas seulement le 29 octobre 1959 dans les pages du premier numéro du magazine Pilote), Abraracourcix a invité la plupart de ceux qui ont croisé la route du duo, pour le meilleur, ou pour le pire, puisque même Barbe Rouge et ses pirates, le devin, ou un légionnaire romain (envoyé spécial de Jules César, qui a refusé l’invitation qui lui avait pourtant dûment été faite, ce qui lui vaut d’ailleurs une belle scène de ménage de Cléopâtre, qui, elle, aurait bien souhaité être présente) sont de la sauterie.

Du coup, la petite fête se transforme en autant de saynètes qui permettent à Uderzo de s’en donner à cœur joie avec les anachronismes, mais aussi de faire la démonstration de ses talents de dessinateur.

Au fil des pages on verra donc madame Agecanonix proposer différents vêtements pour Obélix, qui le conduiront à s’habiller à la mode des siècles à venir, jusqu’à endosser le survêtement et la casquette d’un graffiteur de banlieue d’aujourd’hui, ce même Obélix tenter d’apprendre à lire pour déchiffrer une carte d’anniversaire envoyée par Falbala, on pourra prendre connaissance du « Guide Coquelus des voyages » de l’an L avant J.-C., très utile pour tous les routards gaulois de l’époque (ces pages étaient parues initialement dans Pilote n° 347 en 1966, et font donc leur apparition en album pour la première fois), ou encore se régaler d’un « bêtisier » dans lequel Uderzo s’amuse à changer la dernière case d’un petit strip (tous extraits des vrais albums) pour changer instantanément le sens de l’histoire primitivement racontée, de loin la partie la plus drôle de cet album.

Mais le must reste encore la visite d’un musée du futur, dédié à nos deux héros, et pour lequel Uderzo pastiche allégrement des œuvres célèbres de Léonard de Vinci (je vous laisse deviner laquelle, un indice, c’est Falbala qui est peinte à la place d’une jeune italienne au sourire énigmatique), Rodin, Delacroix, Courbet, Arcimboldo, Manet ou David. Preuve s’il en était encore besoin que dessiner des petits Mickeys (ou des petits Astérix) nécessite un réel doigté. On en avait déjà eu la démonstration dans « Astérix chez les Belges » où il pastichait Bruegel (non repris ici).

L’album se referme sur une double page (encore un exercice qu’affectionne Uderzo) dans laquelle nos deux héros sont célébrés et entourés par une ribambelle de ces personnages qu’ils ont croisé ou côtoyés au cours de toutes ces années.

On sait que, après la disparition d’Uderzo, Astérix lui survivra, puisque le dessinateur a passé un contrat avec Hachette pour que les personnages soient repris après sa mort, notamment par un triumvirat, Régis Grébent et les frères Frédéric et Thierry Mébarki, qui travaillent déjà plus ou moins avec lui depuis de nombreuses années. Uderzo faisant avec eux ce que Roba avait fait avec Verron pour la continuité de Boule et Bill. Espérons que la réussite sera la même.

Alors indispensable ce nouvel album ? Si vous êtes un inconditionnel, oui, évidemment. Si vous êtes allergique, non, bien sûr. Si vous êtes entre les deux, peut-être pas, puisqu’il ne s’agit pas réellement d’une histoire, mais ça vous permettra au moins de vous familiariser encore un peu plus avec Astérix, Obélix, et tout ce petit monde.

Astérix T34 : L’Anniversaire d’Astérix et Obélix – Le livre d’or
Scénariste : René Goscinny
Dessinateur : Albert Uderzo
Editeur : Editions Albert René
56 pages
9,20 euros
Parution le 22 octobre 2009

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