
Bienvenue à Skin City Critique de Vivien Arzul
Le financement participatif est devenu une alternative viable pour des auteurs pour sortir un album en toute liberté et réaliser le tome qu’ils ont imaginé. Romain Mobias et David Atlante se sont tournés vers cette solution pour coucher sur papier leur héroïne gonflée à bloc. Un comic provenant de nos contrées et regorgeant de références, un véritable hommage au genre et à la pop culture possédant tous les attributs pour s’imposer dans le monde du neuvième art.
L’histoire en deux mots :
Skin City est une ville paradisiaque avec ses buildings, sa jet-set, sa population ultra formatée et son paradis illusoire créé grâce à des lunettes qui permettre de voir ce que l’on désire. Tout est donné à cette population, même la nourriture sous forme de pilules. Une nuit, une nouvelle héroïne apparaît bien décidée à ôter les œillères des habitants de Skin City et leur rendre leur libre arbitre et pour cela elle possède des arguments de taille.
Le scénario :
Romain Mobias fait une véritable déclaration d’amour au comics et au neuvième art dans ce premier tome de The Babe. Les codes de la bande dessinée américaine sont utilisés avec malice et de façon judicieuse à travers son personnage principal avec son goût pour la justice, véritable clin d’œil à l’impartialité de Batman. Avec l’antagoniste principal, le scénariste utilise a bon escient la manière très américaine de raconter l’origine de ses personnages. En une planche on perçoit la dangerosité la folie de ce dernier.
La grande force de l’intrigue réside dans son action débridée, le lecteur ne s’ennuie pas un instant. Dès les premières pages, l’action prend place et se met au service du scénario en lui apportant un rythme soutenu particulièrement jouissif. Mais le scénariste ne se repose pas uniquement les exploits de son héroïne. Il a su utiliser judicieusement une bonne dose d’humour qui pastiche le genre super-héroïque, notamment avec la "boob’s attaque" de The Babe ou encore avec le vocabulaire fleuri des personnages qui sauront faire sourire allègrement le lecteur.
Le lecteur averti verra les nombreuses références à la culture populaire comme Star Wars ou Ghostbusters, et cela donne une richesse importante au tome et se montre amusant lors de leurs découvertes. Enfin, il réside un peu de l’Incal dans l’ambiance de la série, avec cette société aseptisée où les gens sont contrôlés par une élite et où une population vivant dans le bas fond préfère vivre dans un paradis artificiel.
De plus l’auteur profite de cette atmosphère pour critiquer la société de consommation et la publicité reine. The Babe n’est pas qu’un hommage aux comics, c’est un album à part entière qui se montre un savant mélange des genres se révélant jubilatoire
Le dessin :
Graphiquement, le tome en met plein les yeux et cela commence dès la couverture qui annonce la couleur avec un Bibendum Chamallow débordant de détails. En une illustration, le dessinateur a su donner l’essence de la série et un formidable hommage à la culture pop.
Ce qui frappe également, c’est le choix du dessinateur en matière de découpage qui laisse une place de choix à son héroïne avec ses prouesses au combat. Cela lui permet de faire la démonstration des pouvoirs détaillés de cette justicière et de faire ressentir au mieux l’intensité des combats. Ce découpage intelligent permet d’avoir une vision plus immersive, comme c’est le cas en début de tome avec l’utilisation des caméras de surveillance qui embarque totalement le lecteur dans le récit. L’auteur distille d’autres bonnes idées comme la superposition du plan d’un labyrinthe sur une case montrant sa dangereuse entrée.
The babe crève les planches, que ce soit à travers des scènes de combats sanglants particulièrement bien détaillées et chorégraphiées, ou à l’occasion de planches uniques où elle brille de tout son aura super-héroïque. La représentation de l’action est une formidable réussite et on se trouve embarqué comme dans un film de Tarantino dans une aventure débridée.
La mise en couleur est réussie, notamment sur le travail lors des scènes de nuit où le travail sur les ombres permet au lecteur de ressentir tout le côté lugubre et inquiétant de Skin City. Le dessinateur a su insister sur l’aspect gore de l’album sans tomber dans la caricature. Lors de la présentation de l’enfance de l’ogre, il réalise pour l’occasion une case en couleur directe du plus bel effet. Mais là où l’auteur fait état de tout son talent et son amour pour son personnage, c’est lors des pleines pages chapitrant chacune des parties qui se révèlent être de véritable hommage à la bande dessinée américaine
The Babe est à la hauteur du succès de son financement participatif. Le tome se révèle être une réussite graphique et scénaristique, par son action débridée et par son humour noir qui plaira à un public mature à la recherche d’une expérience de lecture jouissive. Avec une fin ouverte surprenante, les auteurs invitent les lecteurs à retrouver l’héroïne à la super poitrine face à un nouvel adversaire annonciateur d’une aventure palpitante.