
Pilote Sacrifié 1 Critique de Vivien Arzul
Les kamikazes ont été tristement célèbres durant la seconde Guerre Mondiale, et nombreux sont ces jeunes gens envoyés à la mort pour l’Empereur. De nombreux mangas traitent le sujet pour montrer leur conditionnement et leurs histoires, comme l’Île des téméraires traitant des kamikazes en sous-marin. Delcourt/Tonkam prend de la hauteur en éditant l’histoire d’un pilote suicide ayant véritablement survécu dont ce manga est le témoignage.
L’histoire en deux mots :
En 1944, un avion japonais fonce sur un bâtiment de guerre adverse. C’est celui de Sasaki Tomoji, un héros de guerre qui rêvait de voler étant enfant. Son rêve de tutoyer les cieux a conduit ce jeune homme songeur à incorporer l’école d’aviation de l’armée de terre et devenir un pilote émérite. Plus qu’un pilote, il deviendra comme ses camarades une arme pour l’Empereur dans ses tentatives désespérées de remporter la bataille du Pacifique.
Le scénario :
Naoki Azuma nous offre ici un aspect méconnu de la seconde Guerre Mondiale avec le point de vue de ces sacrifiés et leurs conditions de vie et d’entraînement. On y voit la rigueur présente, mais aussi les rapports entre les différents corps d’armée et la supériorité de façade de l’armée de l’air sur le groupe du héros, et donc les tensions que cela cause.
Le scénariste a su retranscrire parfaitement la fascination du personnage principal pour le vol, en la développant depuis son enfance jusqu’à son intégration dans l’armée. Le lecteur perçoit que le scénariste a cherché à être le plus fidèle possible dans la retranscription de Sasaki Tomoji, et sans être une biographie, les échanges avec ce dernier apportent de la sincérité au récit. De plus, apprendre que ce pilote suicide a survécu à ces attaques gratifie le tome d’une dimension unique qui donne envie au lecteur de connaitre les raisons de sa survie.
Le manga véhicule également de superbes valeurs, d’abnégation, de courage tout en montrant a contrario la stupidité et l’aveuglement des dirigeants militaires qui usent de ce même courage pour en faire une arme. Enfin, ce premier tome est surtout un trésor d’informations historiques et un hommage vibrant à ces pilotes n’ayant pas d’autres perspectives que la mort.
Le dessin :
Shoji Kokami réalise un travail formidable sur ce tome, il est indéniable qu’il a dû accomplir une quantité de recherches titanesque pour donner des cases aussi détaillées. Que ce soit les uniformes, les avions, l’architecture de l’époque, tout est respecté pour un voyage dans le temps immédiat. L’auteur a su montrer la détermination du héros et le fanatisme de certains dans leur regard avant l’impact fatal, ces cases saisissantes apportent énormément au manga. Le travail sur les expressions des personnages est formidable, le lecteur perçoit le moindre sentiment qui anime les protagonistes et apporte un plus indéniable au tome.
Le manga regorge de cases marquantes donnant à ce premier opus une aura particulière. Le lecteur ne sera pas insensible aux cases montrant ces hommes paralysés par la peur avant l’assaut ou encore ce bandana dans l’eau se trouvant être le dernier vestige d’un homme entre les flammes et les débris.
Les passages de voltiges sont véritablement immersifs et apportent à la fois beaucoup de rythme et sont parfois de réels moments suspendus permettant au lecteur de respirer un peu dans cette lecture haletante.
Pilote sacrifié possède toutes les qualités pour devenir un des seinens de référence dans les prochains mois. La série étant toujours en cours au Japon, il reste à voir si les auteurs confirment avec la suite cet excellent premier tome.