
American Dream Critique de Vivien Arzul
Le monde de l’édition est en constante évolution, de nombreuses nouvelles maisons d’édition viennent proposer leur vision du neuvième art et promouvoir des artistes prometteurs. C’est le cas de Bang éditions qui, après s’être établi en Espagne, vient faire connaître ses publications dans l’hexagone. Avec American Dream elle signe le premier album de Bazil, un jeune dessinateur livrant sa vision décalée du western et de la culture américaine.
L’histoire en deux mots :
Deux Indiens arpentent les plaines sauvages de leur réserve comme le faisaient leurs illustres ancêtres. C’est alors qu’ils découvrent la construction d’un fast-food et décident de le rayer de la carte. L’un d’eux découvre lors de l’attaque que sa bien-aimée travaille pour le restaurant. C’est alors que tout s’emballe : les deux assaillants tuent par mégarde des clients et se lancent dans une fuite éperdue qui bouleversera la vie de la réserve et du comté.
Le scénario :
Bazil réalise ici un western bien différent des standards du genre tout en utilisant à bon escient les codes de ce dernier. Néanmoins, il n’y a pas ici de grande guerre indienne ou d’affrontements avec les cowboys, mais une approche plus contemporaine sur les conditions de vie des natifs américains. Le scénariste évoque la vie dans les réserves et, même si c’est décrit avec humour, l’alcoolisme de certains guerriers, véritable fléau dans certaines tribus.
La grande force de ce western c’est son ton véritablement décalé, toutes les situations sont décrites avec un humour bien senti. Que ce soient les attaques, la traque des deux Indiens par le shérif ou les sous-intrigues, toutes sont délicieusement drôles et rafraichissantes.
En toile de fond, Bazil évoque certains travers de la société américaine comme les groupes d’extrême droite encapuchonnée présents dans certains états, mais les décrédibilise avec humour et intelligence. Il évoque également la fermeture d’esprit et le comportement réactionnaire concernant l’homosexualité abordé grâce à un coming out drôle et utile au récit.
L’intrigue regorge d’éléments qui font de ce long tome, un album riche aux multiples thématiques offrant aux lecteurs de grandes opportunités de relecture.
Le dessin :
American Dream est le premier album de Bazil et pour un premier tome le jeune homme s’est offert un sacré challenge avec deux cents planches au style graphique cartoon maitrisé. Le dessinateur s’est fait plaisir avec des planches regorgeant de cases et de détails drôles et un très bon équilibre entre les phylactères et les illustrations. Le dessinateur a su retranscrire avec brio les différents traits de caractère de ses personnages, usant de la caricature à merveille et permettant aux lecteurs de cerner immédiatement les différents protagonistes.
Le découpage très riche accentue cet effet et donne à l’album un aspect très littéraire, loin de l’agitation de certaines séries, mais n’est pas sans rythme non plus.
Les environnements sont bien dépeints, bien que moins représentés que les personnages, pour témoigner ainsi de l’importance des personnages et de certaines situations. La mise en couleur de très bonne facture correspond totalement à l’ambiance du tome et donne un cachet très bande dessinée franco-belge.
Bazil a su garder la même exigence graphique du début à la fin du tome montrant sa grande implication pour sa première réalisation.
American Dream est un premier album rafraîchissant, mis en lumière par une maison d’édition novatrice en quête de futurs talents.
Avec un scénario délicieux et riche, ce tome est une véritable petite pépite du neuvième art qui saura séduire les amateurs d’humour, de western et de récit décalé.