
Étoile Solitaire (L’) Critique de Vivien Arzul
Dans le petit monde du neuvième art, le western est un des genres qui possèdent le plus de personnage emblématique tel que Blueberry, Jerry Spring, Comanche, le Bouncer et tant d’autres. Il n’est pas évident pour des auteurs de réaliser une nouvelle série avec ce genre en toile de fond tant l’aura de ses illustres séries sont présentes dans l’imaginaire collectif.
C’est pourtant le challenge que se sont donné les très prolifique Fred Duval et Jean-Pierre Pecau avec Nevada, une série utilisant les codes du western tout en ne l’étant pas fondamentalement.
Pour cela, ils se sont entouré d’un maître de ce style avec Colin Wilson ayant réalisé avec brio plusieurs tomes de la Jeunesse de Blueberry.
L’histoire en deux mots :
Dans une petite ville près des grandes plaines arides d’un désert, un motard solitaire arrive pour retrouver une actrice célèbre partie dans ce coin reculé assouvir ses moeurs peu conventionnelle. Nevada est un homme de confiance des studios de cinéma pour retrouver leurs acteurs partis s’encanailler. Une nouvelle affaire va l’envoyer au Mexique au-delà du Rio Grande où son instinct et son habileté l’arme à la main seront ses seules portes de sortie.
Le scénario :
Les deux scénaristes ont su utiliser à merveille les codes du western pour faire une intrigue innovante nous emmenant dans les coulisses de l’industrie du cinéma naissante.
On retrouve comme dans beaucoup de récit sur l’ouest américain, un héros solitaire qui force un peu sur la bouteille pour oublier un passé qui le hante.
Cet élément antérieur est évoqué en fin de tome, suscitant la curiosité du lecteur, et le flou qui habille le personnage de Nevada le rend fascinant. De plus, son tempérament casse-cou et son habileté à sortir de toutes situations en fait un héros charismatique.
Les autres personnages ne sont pas en reste et se montrent véritablement intéressants, notamment celui de l’acteur en péril qui apporte une touche d’humour et de second degré au tome. Les scénaristes ne sont pas tombés dans la caricature dans la réalisation de leurs protagonistes et la galerie proposée apporte un plus indéniable au tome.
L’habile combinaison entre les codes du western et l’incorporation d’éléments plus modernes apportent une fraîcheur indéniable à l’album. De plus, les scènes d’action gagnent en tension avec l’ajout d’armement avant-gardiste pour le contexte historique.
Enfin, l’utilisation d’incontournable du Western comme le duel au soleil est jouissive et traitée avec malice et apporte au tome un charme incroyable.
Le dessin :
Avec ce tome, Colin Wilson affirme sa fabuleuse aisance dans la réalisation de western. En effet, dès les premières cases, le dessinateur fait voyager le lecteur dans cet univers avec les plaines arides et leurs immensités projetant les lecteurs immédiatement dans la légende. L’habilité du dessinateur est totale, tant dans la partie western que moderne, l’attention portée sur la réalisation des tenues de l’époque démontre l’attention de l’auteur sur chaque aspect de ses planches
Chacun des personnages colle à l’ambiance de la série et dégage un charisme indéniable, notamment celui d’Éva qui transperce les planches avec sa beauté incendiaire.
Le découpage varié permet aux vignettes de s’exprimer pleinement et empêche une certaine monotonie de s’installer, ce dernier est très cinématographique durant les affrontements aux pistolets et rend toute la tension de ces face à face.
lL dessinateur s’amuse aussi parfois à contourner les règles du découpage et fait sortir le dessin de certaines cases, renforçant l’impact d’une scène d’action par moments.
Petit fait amusant, parfois l’ombre de Blueberry semble planer dans la réalisation de certaines cases avec Nevada montrant le lien entre l’auteur et le personnage.
Avec Nevada les éditions Delcourt tiennent un futur classique grâce à son scénario novateur aux perspectives multiples pouvant emmener le héros vers de nombreuses aventures. Cet album est surtout l’immense bonheur de retrouver le talent de Colin Wilson dans l’exercice du western et s’ébahir devant sa maîtrise des environnements sauvage américaine. Une réussite en tout point qui appelle une suite la plus rapide possible.