
Red rat in Hollywood (The) 1 Critique de Vivien Arzul
En ce mois d’avril, Vega édition revient avec une série singulière montrant le lien étroit entre la chasse aux communistes après-guerres et la machine à rêve américaine
L’histoire en deux mots :
Alors que la machine hollywoodienne ne cesse de produire des chefs-d’oeuvre cinématographique pour tenter d’effacer les traumatismes de la Seconde Guerre mondiale, l’impitoyable traque du communisme se joue en coulisses, où le gouvernement s’efforce de débusquer les partisans dans toutes les sphères de la société. Le cinéma n’y échappe pas, et certains des métiers vont combattre à leur manière l’oppression pour garantir la liberté de tous malgré la Guerre Froide qui s’installe.
Le scénario :
Ce premier tome est un véritable dossier de l’histoire américaine, tant il déborde d’informations. Même si de prime abord on peut penser que l’album divulgue beaucoup trop d’éléments relatif au contexte, il est surtout le témoin du grand travail de recherche de l’auteur sur cette période. En effet, l’auteur n’oublie aucun aspect du maccarthysme, donnant au lecteur de précieuses informations, avec le rôle du HUAC, le bureau chargé de la question communiste dans le milieu du cinéma, cette commission sur les activités antiaméricaines qui voit en Hollywood un vivier rouge considérable destiné à pervertir la nation américaine.
Le recrutement des agents de renseignements de FBI est également très bien dépeint, montrant tous les ressorts irréguliers dont l’agence use pour avoir des informateurs, écouter, exercer son chantage et lancer ses accusations arbitraires.
L’auteur démontre par ce biais l’ambiance de méfiance omniprésente dans la communauté américaine de l’époque où le monde est divisé en deux catégories : les rouges et ceux qui les chassent.
Le scénariste parvient avec beaucoup de justesse à retranscrire la haine viscérale et la paranoïa qu’entretien Hoover à l’égard des communistes, le montrant sous son vrai visage, en phase avec ce qu’il était dans l’intimité. Il dévoile aussi la corruption du pouvoir et sa totale domination par les méthodes du FBI.
Cependant, le tome n’est pas qu’une leçon d’histoire, il est aussi un formidable hommage au cinéma américain, fourmillant de noms illustres du septième art.
Le dessin :
Osamu Yamamoto réalise un tome parfaitement maîtrisé. Il l’aborde avec un style noir, plongeant le lecteur immédiatement dans le contexte et le style du récit. La chose qui frappe le lecteur dès les premières pages réside dans le formidable travail sur la réalisation des acteurs ; la beauté d’Audrey Hepburn crève la planche. Les autres acteurs de légende ne sont pas en reste, l’auteur a su rendre en tout point le charisme de Frank Sinatra ou d’Humphrey Bogart. Les personnages très expressifs laissent transparaître justement leurs émotions pour donner énormément de vivacité aux planches, mais là où le dessinateur excelle, c’est dans la retranscription de la froideur et du machiavélisme de l’agent Kibby.
Les planches regorgent de détails et l’incorporation des nombreux phylactères de nuit pas à l’immersion graphique. Le travail de trame quant à lui est remarquable, sublimant certains passages comme la poursuite en début d’album.
The Red rat in Hollywood n’est pas un tome facile à aborder, certes, mais une fois le pas franchi on se retrouve happé par ce récit intéressant sur l’histoire commune d’Hollywood et du maccarthysme. Un tome pour les amoureux de cinéma, d’histoire et pour les lecteurs de mangas qui cherchent à découvrir toutes les belles curiosités que nous fait découvrir la bande dessinée japonaise.