Kakushigoto 1
Kakushigoto

Kakushigoto 1 Critique de Vivien Arzul

Parution: 11 avril 2019
1 édition recensée
Goto Kakushi est auteur de manga et père célibataire d’une petite jeune fille, Hime. Dès le début de l’aventure, la jeune Hime découvre fortuitement le métier de son père, auteur de manga populaires bas de gamme. Problème, Goto n’assume pas du (...)

Le travail de mangaka est peu méconnu dans nos contrées, voire un peu fantasmé par nous autres lecteurs. Pourtant ce travail exigeant est souvent rapporté dans des séries ou des biographies. Kouji Kumeda a décidé de parler de son quotidien à travers une fiction drôle et tendre en abordant à la fois le travail de dessinateur mais aussi la perception du public sur ce métier envié par certains et incompris par d’autres.

L’histoire en deux mots :
Le jour de ses 18 ans, la jeune Himé apprend la véritable profession de son père, il est mangaka. Mais ce papa poule n’est pas un auteur de Shonen ou de Shojo, il exerce son talent dans des séries un peu osées au succès considérable. Après cette surprenante découverte, elle se souvient des ingénieux stratagèmes que son auteur de père a mis en place pour lui épargner cette embarrassante situation et lui donner une enfance comme les autres.

Le scénario :
La grande force de ce tome réside dans son scénario à la fois rafraichissant et informatif sur la vie d’un mangaka. Il n’est pas impossible de penser que Kouji Kumeta a puisé dans son expérience personnelle pour les nombreuses anecdotes qui émaillent le tome sur cette profession. Au fil des chapitres on apprend plus sur ces créateurs, leurs studios, le rôle de leurs assistants ou de l’équipe éditoriale. Le fait d’aborder le changement de responsable éditorial est une bonne idée, en plus d’être un ressort comique important. Il montre la grande fluctuation de ses équipes au sein des maisons d’édition japonaises. L’auteur aborde aussi sans détours leurs angoisses face au délai ou à la page blanche, montrant un quotidien régi par le stress et l’urgence, loin de l’idée du créateur prenant son temps pour rendre une copie parfaite.
Les fins de chapitres sont également ponctuées de notes sur le rôle et la vie d’auteur, apportant des informations supplémentaires intéressantes.
C’est surtout le contraste entre la vie de papa poule et celle de mangaka érotique qui réalise le tour de force de ne pas rendre le tome simplement didactique. La relation entre Kakushigoto et sa fille est d’une grande tendresse et l’auteur a su retranscrire l’amour et la bienveillance d’un père pour sa fille à chaque page. Cette relation fusionnelle des deux côtés donne un cachet unique aux deux protagonistes, éclipsant parfois un peu les autres. L’humour n’est pas en reste avec des situations cocasses comme la professeur qui capture à chaque fois les individus près des enfants à l’aide d’une grande perche. Les différents stratagèmes mis en place par le père montrent l’amour inconditionnel qu’il lui porte afin de lui éviter les moqueries de ses camarades et vivre une enfance paisible.

Le dessin :
Le style graphique de Kouji Kumeta s’apparente de prime abord au Shojo, tant le trait y est doux et épuré. Il se dégage de ce dernier une grande sérénité qui fait écho à l’insouciance des souvenirs d’enfance de Himé. Ce parti pris graphique renforce également la retranscription de la relation privilégiée père/fille du volume parvenant à retranscrire cette bulle affective entre les deux personnages. Bien que le dessin paraisse un peu statique par moment, les jeux de regard sont saisissants et laissent transparaître de manière très juste les diverses émotions des protagonistes pour apporter au tome une sensibilité unique.
La mise en page est incontestablement le point fort de la série, les planches regorgent de cases détaillées, de dessins se chevauchant. Bien que le récit se veuille intimiste, les scènes d’action sont énergiques, en rupture avec l’ambiance générale.
Enfin, la couverture et les planches en couleur en début et fin de tome sont superbes, il y a comme un air de Miyazaki qui plane dans cette mise en couleur soignée. La couverture quant à elle est le plus beau témoignage de l’extraordinaire relation entre ce père et sa fille.

Kakushigoto est un Seinen pas comme les autres, abordant avec justesse et humour les conditions de mangaka et de parent célibataire. C’est surtout, une belle déclaration d’amour d’un père un brin maladroit à sa fille. Un tome à l’humour savamment distillé qui saura séduire chaque amateur de bande dessinée japonaise.

Par Vivien Arzul.
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